Un homme fier et droit - L'histoire d'Adrien Bisaillon
Adrien Bisaillon ne s’est jamais laissé marcher sur les pieds.
Il était de ceux qui ont des opinions et qui les défendent. Il était un père, un grand-père, un arrière-grand-père, un oncle et par-dessus tout un homme aimé et respecté.
Adrien Bisaillon était opiniâtre, combatif, généreux, têtu et affectueux.
Il est venu au monde sur la rue Palm à Montréal. Le troisième des dix enfants de Laurin Bisaillon et de Adrienne Tremblay, ne donnait pas sa place, on décrit Adrien comme un enfant enjoué et turbulent.
En 1948, son père s’effondre sur son lieu de travail. Les médecins ne savent pas de quoi il souffre, mais on lui conseille d’aller vivre à la campagne. On apprendra plus tard qu’il était atteint de la maladie de Ménière, un trouble de l’oreille interne qui fait notamment perdre l’équilibre. À cette époque, il n’y a pas de filet social. La maladie de Laurin Bisaillon, qui l’empêche de travailler, le plonge dans la pauvreté.
Adolescent, Adrien déménage avec sa famille à Duhamel, en Outaouais. Il habite une maison louée à la sœur de sa mère. Comme ses frères et sœurs, il tisse des liens très forts avec ses quatre cousins, les Fournier. Ces liens, il les maintiendra toute sa vie. Adrien était loyal.
La famille réside ensuite quelque temps à Saint-Jean-de-Matha avant de revenir à Montréal. Peu après il se trouve un emploi de responsable du service à la clientèle pour la compagnie Ottawa Valley Lumber qui fabrique des matériaux de construction, située à Pointe-Saint-Charles. C’est un jeune homme qui a de l’entregent et de l’assurance, des qualités qui le caractériseront jusqu’à la fin de ses jours. Il se découvre vite des talents de vendeur. Lorsqu’il vous parle, il vous regarde droit dans les yeux et vous vous sentez important. Adrien était un battant.
Jeune adulte, il est déjà père de ses trois filles : Danielle l’aînée et les jumelles Suzanne et Diane nées d’une première union avec sa première femme, Muguette Girard. Le couple possède un casse-croûte à Duhamel. Adrien démarre rapidement sa propre entreprise de revêtement en aluminium et connaît beaucoup de succès. Il se tourne ensuite vers le domaine de la vente d’automobiles. Au début des années 1980, il est propriétaire d’une concession GM à Montebello. À l’époque, le Québec traverse une crise économique et des taux d’intérêts historiquement élevés. Plus tard, il deviendra gérant pour de gros concessionnaires automobiles comme Ford et GM. Infatigable et travaillant, il a même été chauffeur d’autobus dans les dernières années de sa vie active. Il a franchi tous les obstacles, sans jamais perdre l’optimisme qui le caractérisait. C’était un battant qui ne s’est jamais apitoyé sur lui-même. Adrien était un entrepreneur.
Adrien est aussi un athlète. Très talentueux au hockey, il a même eu un essai avec le Canadien Junior, ce qui n’est pas rien à la fin des années 1950. Il était aussi lanceur au baseball et un très bon joueur de golf. Il était fier de ses performances et était un compétiteur reconnu dans son dernier club de Laval-sur-le-Lac. Adrien était fier.
Sa famille se souvient des soupers qu’il organisait dans sa grande maison de Sainte-Thérèse. Des parties de poker qui s’étiraient tard dans la nuit avec ses frères et soeurs, des barbecues bien arrosés avec des steaks géants, des neveux et nièces qui se baignaient dans sa piscine creusée. Il avait aussi un talent de chanteur. Dans un resto-bar de Saint Hyppolite, qu’il fréquentait occasionnellement, il lui arrivait de reprendre les chansons de crooners, accompagnées d’un pianiste. Adrien était un rassembleur.
Depuis 1994, Adrien partage sa vie à Nicole Trottier. C’est elle qui a pris soin de lui dans les derniers jours de sa vie. Puis, le 14 juin dernier, il s’est levé et s’est subitement effondré. Adrien est mort debout, comme il a vécu.
Témoignages des filles d’Adrien
J’ai un beau souvenir avec mon père qui m’a vraiment marquée. Nous avions à peu près 13 et 14 ans et il avait loué un chalet au Lac Paré à Chertsey près de chez ma tante Louise. Il avait décidé de faire une expédition en motoneige avec ses trois filles en partant du Lac Paré vers Duhamel. C’est toute une randonnée, presque 200 kilomètres, avec trois adolescentes sur leurs motoneiges. Il a travaillé une partie de la soirée à préparer les motoneiges et le samedi tôt le matin nous sommes partis pour cette aventure. La motoneige de Suzanne s’est brisée en cours de route et moi, j’ai pris le clos dans un virage et cassé ma visière sur un arbre. Jamais il ne s’est impatienté après ! Nous sommes arrivés à Duhamel avec une motoneige en moins et très tard en soirée. Nous étions épuisées, mais tellement heureuses. Et mon père, il était heureux et fier d’avoir accompli ça avec ses filles.
Cher papa, prendre soin de toi fut un pur plaisir. Tu étais tellement agréable et gentil. Repose en paix avec les tiens. Bisous, je t’aime xxx
Par Diane Bisaillon
De ses trois filles, j'ai dû être la plus tannante. J’étais de l'ouvrage, un p'tit gars manqué je jouais au hockey, au baseball, au ballon-balai, je me suis cassé le bras, ai eu des points suture à maintes reprises, je me battais avec les garçons de mon école et c'est lui qui m'avait montré comment me battre, il m'avait dit : « tu frappes, la première tu fermes ton poing, tu fermes les yeux et tu frappes ». J'avais très bien compris! Dès le lendemain matin au coin de la rue avec un garçon qui prenait l'autobus j'ai appliqué cette leçon à la lettre.
Quand je me suis séparée de mon mari, je ne savais pas trop quoi faire de ma vie. Mon père m'a dit : « Tu devrais devenir chauffeur d'autobus ». Il m'a amené faire un tour dans son autobus et en débarquant je lui ai dit : «T’es malade papa, je ne serai jamais capable de conduire ça! » J'ai décidé de prendre un cour et je suis devenu chauffeur d'autobus scolaire. C’est lui qui m'a fait avoir ma première job chez Limocar avec lui. Quel bonheur !
J’ai été chauffeur quatre ans d’autobus scolaire. Ensuite je voulais conduire un coach et j'ai réussi. J’ai conduis pendant vingt-cinq ans ces gros autobus. Il m’a super encouragé. Merci papa... Je me suis super rapprochée de lui, on a même habité ensemble pendant cinq ans. Il me faisait à souper tous les soirs. J’ai dû prendre vingt livres ! On sortait ensemble à St- Hyppolite à la brasserie. Que de bons moments !
Il savait qu'il pouvait compter sur moi et sur mes deux sœurs. Les dernières années, nous avons pris soin de lui. Je l'aimais, on l'aimait et il le savait. Quel papa merveilleux ! Je t'aime mon beau papa. Amuse-toi bien là-haut et prends soin de nous.
Par Suzanne Bisaillon
De nombreuses anecdotes me viennent en tête.
Quand tu venais nous rejoindre au Mont-Lieu juste pour prendre un verre avec tes filles.C’était vraiment cool pour un papa. Mais tu repartais avec Diane parce que tu la trouvais trop jeune !
Nous t’attendions avec impatience le soir de l’Halloween, c’est toi qui arrêtais au magasin pour nous trouver des costumes après ton travail et tu nous accompagnais dans les rues.
Un Noël, comme cadeau, tu nous avais monté une immense piste de course au sous-sol. Pendant plusieurs jours, tu nous avais interdit de descendre et je me souviens qu’on entendait des bruits de construction, de coups de marteau. Eh oui, une piste de course, pas des poupées mais on avait été super contentes.
La fois où j’ai dû le ramener après une soirée de carte chez Émile de St Basile-le-Grand à Ste-Thérèse avec son gros Cadillac ! Je me souviens de mes deux sœurs qui me demandaient : « Es-tu certaine du chemin « .... Ben oui, voyons ... » Je n’étais pas si certaine que ça! J’avais débarqué du boulevard Décarie sur la voie de service, j’avais réveillé papa en lui demandant si j’étais à la bonne place, il avait regardé ça et m’avait dit : « Non rembarque sur l’autoroute ». Et hop ! Il s’était rendormi.
Je n’ai que de bons souvenirs de mon père quand j’étais petite. Il était toujours très présent. Il venait patiner avec nous, skier, se promener après le souper, faire du vélo, du golf, de la motoneige. On est allé en voyage de pêche, ou en Floride.
Quand il dansait avec moi le Rock & Roll ou le triple swing j’adorais ! Il nous prenait parfois deux à la fois pour nous faire danser Diane et moi.
La belle vieille musique de cassettes huit pistes dans l’auto : Elvis, Frank Sinatra, Joe Dassin… On les connaît par cœur.
Les soirées cinéma quand tu allais chercher les grosses bobines de film à Montréal et qu'on s’installait dans le sous-sol.
Je me souviens de la fois où il est venu nous chercher au collège à Joliette quand nous étions pensionnaires pendant la tempête du siècle en 1970. Notre héros! Il n’aurait pas laissé ses filles passer la fin de semaine au collège. Combien de nos amies ont dû y rester!
Mes tours d’auto avec lui après le souper quand il me faisait conduire dans les petits chemins de campagne de St-Augustin et des environs, j’avais 11 - 12 ans
Le temps passé avec lui à l’hôpital… Il me disait souvent : « je t’en demande beaucoup, je suis de l’ouvrage » et je lui répondais : « Ben non papa t’as pris tellement soin de moi maintenant c’est à mon tour et j’étais fière et heureuse de pouvoir passer ce temps avec lui et surtout d’en prendre soin. Il le méritait.Quand il se réveillait et qu’il m’apercevait, je le voyais dans ces yeux qu’il était tellement content
Il nous aimait vraiment très fort il nous le disait et nous le ressentions.
Beau papa d’amour, repose en paix et j’espère de tout cœur que tu es avec ceux que t’aimes tellement : ta mère ton père tes frères et sœurs. Fais la fête comme tu sais si bien le faire.
Par Danielle Bisaillon
Témoignage l’épouse d’Adrien
Le 22 octobre 1994, j’ai rencontré Adrien au petit bar de Saint-Hippolyte. En le voyant, j’ai été séduite. Mon amie Pauline Labelle nous avait présentés, et ce fut le coup de foudre.
Je l’ai revu deux mois plus tard. Il m’a alors invité à pour à cette même brasserie.
Pendant la soirée, il me donnait toutes sortes de prénoms de filles, mais jamais le mien. Il m’intéressait tellement que je ne lui ai pas fait de reproche.
On s’est revus en décembre 1994. J’ai passé les fêtes avec lui; et c’était parti pour nous deux.
En octobre 1995 on a fait le partage de joncs à la brasserie Saint-Hippolyte et le 2 novembre 1996 on s’est mariés.
Nous avons fait de la moto pendant vingt ans.
Nous avons fait de beaux voyages, avons visité l’Ouest canadien en VR avec Lisette et André.
Nous avons fait des croisières, nous avons été à Cuba, en République dominicaine et à la Riviera Maya.
Nous sommes allés souvent en Floride au parc de VR chez Lisette et André.
Nos 26 ans ensemble ont été les plus beaux jours de ma vie.
Adrien était doux généreux, protecteur : j’étais en sécurité avec lui.
J’ai perdu le goût de vivre tellement j’ai de la peine.
Je l’aimerai jusqu’à ma mort et j’espère le retrouver un jour.
Bon voyage mon amour et attends-moi, j’arrive bientôt.
Ta femme qui t’adore.
Nicole xxxx
Par Nicole Trottier
Mes souvenirs d’Adrien
Pour moi, Adrien était plus qu'un grand frère, c'était un ami sur qui j'ai compté beaucoup de fois dans ma vie, surtout quand j'étais plus jeune. Il m'a rendu mille et un services que je n’énumérerai pas.
Nous avons pratiqué de nombreuses activités ensemble lorsque j'étais plus jeune, comme des voyages de chasse et de pêche, de vacances dans le sud en couple. Les sports comme le hockey, je n'arrivais pas à sa cheville, mais quand même, je l'ai impliqué durant les années 1970 dans une ligne de garage de la Section Antiterroristes de la Police de Montréal et en plus de jouer avec nous il était commanditaire de nos chandails avec un autre homme d'affaires de la famille des Arsenault, aussi policiers du SPVM.
Le ski alpin faisait aussi partie de nos sorties au Mont-Tremblant. Il était un très bon skieur. Nous avons évidemment joué au golf ensemble quelques fois et encore là, je n'étais vraiment pas compétitif, je n'étais pas de taille, mais, il n’y voyait quand même pas de problèmes, d’inconvénients. En résumé, Adrien avait le sport dans le sang.
C'était aussi une personne d'agréable compagnie, toujours aimable avec les gens qui l’entouraient et en particulier les membres de sa famille. Il avait beaucoup de caractère tout en étant gentil. Quels bons soupers nous avons faits ensemble! Adrien était le roi du rôti de bœuf, juteux dans la partie de l’entrecôte et il y a quelques semaines nous avons eu le plaisir de se revoir lors d'un souper chez ma sœur Lisette qui avait fait cuire le rôti à la façon d’Adrien. Même si sa santé était très détériorée, il a bien aimé son morceau de viande qu'il a quand même dégusté avec un bon verre de vin rouge.
Adrien était une personne qui aimait la vie, l'amour et c'est certain qu'avec les autres membres de notre famille qui restent, nous allons nous souvenir de nos soirées déjà un peu loin ou Adrien aimait interpréter diverses chansons autant en français qu'en anglais, comme le reste de notre famille. L’une d’elles est « That’ s Amore » qu’il aurait certainement aimé entendre de la part de Ma Symphonie Vocale de la Fraternité des Policiers et Policières de Montréal lors d'un prochain spectacle. Mais la vie en a décidé autrement. Il adorait nos spectacles et il nous suivait depuis plus de 20 ans.
Notre mère donnait à tous ses enfants des surnoms. Celui d’Adrien était « Titi » alors qu’il était quand même assez costaud et un grand homme, dans toute la force du mot.
Il est maintenant parti pour le long voyage vers une île inconnue, je lui souhaite donc BON VOYAGE !
Par Émile Bisaillon
Mon frère Adrien était un homme généreux et très protecteur pour toutes les filles de sa famille.
Toute petite, il était celui qui prenait ma défense, je ne sais pas si c’est parce qu’il était là au moment de ma naissance. À cette époque on vivait à Duhamel. Quand il est entré dans la maison, j’étais née, il avait alors douze ans. C’est sûrement à ce moment que je suis devenue sa protégée. Adrien appelait ses filles et ses petites sœurs : « Ma belle fille ». J’ai toujours trouvé ça drôle parce qu’on me demandait si j’étais sa fille.
J’ai travaillé pour lui, c’était « un bon boss ». Je me rappelle aussi de très beaux moments passés avec lui à la petite brasserie près de chez lui. Il aimait tellement chanter, c’était un crooner et il avait une belle voix.
Adrien c’était un très bon fils pour notre mère et un très bon grand frère. Il va me manquer beaucoup.
Par Pauline Bisaillon
Mon frère Adrien était un homme très généreux, très proche de sa famille. Il a même acheté un duplex à Boisbriand pour que nous y habitions toute notre famille.
Lorsquej'étais jeune, il me donnait de généreux pourboires quand je cirais ses chaussures ou quand j'allais faire aiguiser ses patins. Il était très reconnaissant comme toujours. Je garderai pour toujours de merveilleux souvenirs de lui
Par Lisette Bisaillon
Adrien était un grand frère qui faisait attention à sa famille.
Quand je me suis séparée, il m'a accueillie chez lui quelque temps et il a bien pris soin de moi. C'était quelqu'un de généreux.
Quand ma fille Chantal est née, il m'a acheté une bassinette et il s'est assuré que je ne manque de rien.
Il était un gars de party et il aimait chanter.
Tu vas me manquer mais un jour, nous allons nous revoir, j'en suis sûre.
Je t'aime Adrien et bon voyage.
Par Hélène Bisaillon
Voici un beau souvenir avec mon ami et beau-frère.
Adrien et Nicole venaient nous visiter en Floride. Nous chantions, mangions, buvions. Nous avons aussi voyagé dans l’Ouest canadien et à St-Tite. Ce sont des moments formidables que je n’oublierai jamais.
J’espère qu’on répétera ces moments ailleurs.
Bon voyage, mon ami,.
Je t’aime, pour toujours.
Par André Gagné